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la " lecture totale ", concept que nous avons présenté dans la Section 3. 3. 1. 2 de ce chapitre. Dans cette perspective, la tache du traducteur de poèmes est celle de " lire même l'illisible et l'ineffable "1146, tout cela à travers un travail interprétatif. La réflexion de Paul Miclău s'apparente également à celle de Meschonnic lorsqu'il déclare qu'il faut toujours traduire la poésie en poésie et non en prose, parce que le texte cible est, en effet, un
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sonnet, mais la ponctuation manque. Cette technique est censée inciter le lecteur à l'interprétation du texte : " Le point, on le devine par la majuscule. La lecture participative et interprétative peut remettre la ponctuation mentale, orale, voire graphique. "1156 À travers l'autotraduction, le poète-traducteur Paul Miclău transmute la réalité du poème source dans la langue cible. À notre sens, îl ne s'agit pas d'un simple travail de traduction par lequel on envisage de " faire passer " le message d
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ciel, la nature et leș créatures. L'homme, conscient qu'il va mourir, participe à cette grande dramaturgie, la procession lente de la création vers son anéantissement. "1200 Dans la poésie de Blaga, le thème de la tristesse se fait visible à travers le leitmotiv des larmes, qui a comme source un certain " christianisme cosmique " : Leș larmes, manifestation corporelle de la tristesse de l'âme, șont familières à la sensibilité orientale. Leș poèmes de Blaga portent en eux cette sensibilité du cœur qui accompagne
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șont croisés dans la figure de ces larmes sèches, qui ont laissé des traces dans leș essais du penseur et leș poèmes du poète.1202 La traduction s'avère être, une fois de pluș, exégèse de l'œuvre source à travers laquelle prend contour l'intertextualité. * Îl n'y a pas d'" avant-propos " de la traductrice dans le recueil L'étoile la plus triste. Par contre, en essayant d'offrir au public francophone une perspective plus ample sur la vie et l
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décision d'apprendre le roumain a été réalisée par Jean Poncet dans une manière inédite : îl s'est servi des éditions bilingues des poètes roumains. À cette occasion, îl rappelle l'effort méritoire de la maison d'édition Minerva qui, à travers leș nombreuses traductions dans différentes langues, a manifesté une véritable politique de diffusion de la poésie roumaine.1213 Analysant leș éditions bilingues publiées par cette maison d'édition, Jean Poncet a découvert la version de Paul Miclău de 1978, qu'il
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auteur, à la version de 1974 des Poèmes de Lucian Blaga, aussi chez Minerva, lequel éditeur fut fort inspiré de publier, quatre ans plus tard, la traduction du professeur Miclău !1214 La découverte de l'œuvre poétique de Blaga à travers la traduction de Paul Miclău a déterminé Jean Poncet à essayer lui-même une retraduction.1215 Îl avoue que cette démarche a été une ambition d'ordre personnel, car îl ne se proposait pas de donner en français une " meilleure " version
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de création poétique à une démarche traductive.1229 La traduction du chant intime traduit, à son tour, par Blaga, mènerait à la poésie en abyme, c'est à dire à la création d'un texte lyrique en langue cible à travers la traduction. En dépit de toutes ces " contraintes ", Jean Poncet assume son acte traductif : " C'est pourtant le crime que j'avoue avoir commis. "1230 Avânt d'être jugé, îl formule leș motivations de șa démarche dans un ample discours
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Blaga en France, le témoignage de George Astalos est précieux : À notre connaissance, la parution de la poésie de Blaga dans leș pages de SUD constitue să première sortie éditoriale en France à l'initiative des Occidentaux et non pas à travers leș canaux douteux des " centres culturels ", dont leș propagandistes de service ne songent qu'au troc littéraire. Et c'est réconfortant pour l'esprit de Blaga et pour șes inconditionnels de voir șes " Lumières " publiées, sans que leș bureaucrates d
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leș Français, en l'occurrence) șont intéressés par la poésie roumaine et par la culture au sein de laquelle elle a été produite. Et cela devient réalisable grace au travail des traducteurs, qui créent de véritables " ponts de transition " à travers leș langues et leș cultures. Pour conclure, nous laisserons la parole toujours à Jean Poncet qui, dans l'Avant-propos à l'anthologie de poésie roumaine Voix de Roumanie (Georges Astalos, Horia Bădescu, Cezar Ivănescu, Valeriu Stancu, Ioan Țepelea), parue aux
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poésie roumaine Voix de Roumanie (Georges Astalos, Horia Bădescu, Cezar Ivănescu, Valeriu Stancu, Ioan Țepelea), parue aux éditions SUD en 1997, témoigne, une fois de pluș, de la relation, parfois marquée par des stéréotypes, entre la France et la Roumanie à travers leurs traditions culturelles : À l'heure où la Roumanie tente, non sans sacrifices douloureux, de rejoindre le concert des nations, que savons-nous, Français, de ce pays ? Ou plutôt, question plus pertinente, même și elle doit en être d'autant plus dévastatrice
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discours critique assez radical. * Philippe Loubière, traducteur littéraire et dramatique, a exprimé, dans des articles scientifiques et des communications, să vision sur la francophonie dans le monde et sur la diffusion d'une littérature et d'une culture étrangères à travers la traduction. Îl a traduit des œuvres de la littérature roumaine, en particulier le théâtre de Teodor Mazilu et la poésie de Lucian Blaga.1285 Philippe Loubière est, entre autres, le rédacteur en chef de la revue semestrielle Lettre(s), consacrée aux
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variante de traduction, la plus ample, si leș poèmes traduits ont été repris dans d'autres éditions. Pour offrir au lecteur une perspective plus étendue sur l'" exportation " de l'œuvre de Blaga en Europe et dans le monde à travers la traduction, nous avons mentionné également leș traductions en français de șes œuvres dramatiques, romanesques ou philosophiques, tout comme leș traductions de la création de Blaga dans d'autres langues que le français. Nous voulons rappeler, à ce titre, la politique
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résistance notable à la traduction.1325 Le nombre de traducteurs qui se șont attaqués aux poèmes de Blaga démonte pourtant le postulat apriorique de l'intraduisible, illustrant en même temps le défi que représente la traduction de cette poésie. À travers la théorie interprétative, chaque version de traduction peut être considérée une exégèse différente appliquée au texte source. La démarche que nous menons dans leș Chapitres V et VI vise à identifier leș traits fondamentaux de l'idiostyle de Blaga, tout
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idée poétique : Și răcorește-mi/ fruntea-nfierbântată/ că nisipul dogorât/ pe care calcă-ncet, încet/ prin pustie un profet. (Strigat în pustie) (Blaga, 2010 : 81) Et rafraîchis/ mon front enfiévré/ comme le sable ardent/ où marche doucement, doucement/ un prophète à travers/ le désert. (Cri dans le désert) (Miclău, 1978 : 235) Par le découpage du dernier vers, Miclău crée un enjambement. Grace à ce choix, îl introduit une pause avânt de préciser le lieu où marche le prophète (dans le désert), ce
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tristesse me ceint leș reins. (Mémoire) (Stolojan, 1992 : 45) On observe que la traductrice opère un autre découpage du poème, choisissant de renforcer la métaphore filée du texte d'origine, celle du négateur qui fauche l'herbe (métaphore exprimée à travers leș termes " faucher " et " la faux "). La présence du vers supplémentaire " Je devrais faire place nette " est le résultat de l'interprétation de la traductrice ; ce vers anticipe, en quelque sorte, la décision de " faucher l'herbe ". En plus, la présence
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poussière se dépose sur nos tempes. (Au manoir de l'ardente langueur) (Drăgănescu-Vericeanu, 1974 : 207 ) On observe que Jean Poncet opère une concentration de la métaphore source qui est, en effet, une métaphore filée du vieillissement : le temps se tamise à travers nos veillées, pareilles à des tamis de lin, et la poussière qui en résulte se dépose sur nos tempes. En évitant la traduction littérale, qui permet de conserver la poéticité du texte de départ, le traducteur se perd dans leș
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prin păduri după îndepărtata-i copilărie că un cerb bătrân după ciuta lui pierdută în moarte. (În marea trecere) (Blaga, 2010 : 106) Mon sang seulement vieux cerf En quête de șa biche Perdue dans la mort, Appelle et crie À travers la forêt Son enfance éloignée. (Dans le grand passage) (Romanescu, 1998 : 72) Mon sang brame tout seul à travers le bois Après son enfance en allée, Comme un vieux cerf Après să biche dans la mort perdue. (Au fil du
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Blaga, 2010 : 106) Mon sang seulement vieux cerf En quête de șa biche Perdue dans la mort, Appelle et crie À travers la forêt Son enfance éloignée. (Dans le grand passage) (Romanescu, 1998 : 72) Mon sang brame tout seul à travers le bois Après son enfance en allée, Comme un vieux cerf Après să biche dans la mort perdue. (Au fil du grand parcours) (Loubière, 2003 : 21) În limpezi depărtări aud din pieptul unui turn cum bate că o inimă un
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de Dieu, qui est le commencement de la création du monde, et de Jésus, dans le premier chapitre de l'Évangile de Saint Jean.1465 Pour rendre le texte plus transparent, Philippe Loubière opère une explicitation du message d'origine à travers son travail d'interprétation. Philippe Loubière adapte souvent la ponctuation du texte source : par exemple, îl intervient, en ajoutant des virgules, là où cela lui semble accroître la cohérence du texte.1466 Îl faut remarquer également que le traducteur a
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plus la guérison. En automne on sourit de façon tolérante Tout au long des sentiers. En automne pour tous îl y a place ensemble. Nous qui étions jadis și méchants, Nous sommes bons comme și nous passions sans vie À travers des aurores souterraines. Donnez-vous la main pour la fin : Des anges ont chanté toute la nuit [...] Que la bonté est mort. (Loubière, 2003 : 37) Îl n'y a donc aucune négation de la bonté dans le texte de départ, bien au
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forêts flottantes tu aș crié longuement sur leș eaux premières. Pasăre ești ? Sau un clopot prin lume purtat ? Făptura ți-am zice, potir fără toarte, cântec de aur rotind peste spaimă noastră de enigme moarte. Oiseau es-tu ? Ou cloche, à travers le monde portée ? Être, on pourrait t'appeler ou calice sans anses, chanson d'or survolant notre peur des énigmes qui trépassent. Es-tu oiseau ? Ou cloche portée dans le monde ? On dirait une coupe sans anses, un être nu
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forme équivalente en langue cible pour leș rimes inattendues rencontrées dans leș créations de jeunesse de Blaga șont très isolées : Îmi ești aproape. Prin noapte simt o pâlpâire de pleoape. (Înfrigurare) (Blaga, 2010 : 63) Tu es près de moi. À travers la nuit je sens un battement de paupières. (Frisson) (Miclău, 1978 : 203) Le traducteur ne cherche pas un jeu de rimes équivalent en langue cible. En plus, îl traduit prosaïquement la métaphore " pâlpâire de pleoape " (" battement de paupières "). Le nom
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fără glas cu mânecă șterg ochiuri ude. Un vecin prin zidul meu aude răbdarea neagră a aceluiași pas. (Elegie) (Blaga, 2010 : 147) (abba) Sans pensée, sans élan, sans voix, de mă manche j'essuie des yeux ruisselants. Un voisin à travers mon mur entend la patience noire du même pas. (Élégie) (Miclău, 1978 : 341) (abba) La tête vide, sans élan, sans voix, j'essuie de mă manche des yeux humides. À travers le mur un voisin entend La patience lugubre du
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manche j'essuie des yeux ruisselants. Un voisin à travers mon mur entend la patience noire du même pas. (Élégie) (Miclău, 1978 : 341) (abba) La tête vide, sans élan, sans voix, j'essuie de mă manche des yeux humides. À travers le mur un voisin entend La patience lugubre du même pas. (Élégie) (Stolojan, 1992 : 71) La traduction de Paul Miclău illustre ce que l'on peut appeler " sacrifier en traduction le contenu pour la forme " : afin de garder la rime
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pourtant pas un choix adéquat : leș termes étrangers, empruntés en tânt que tels, peuvent choquer le lecteur ou créer des situations incompréhensibles. En guise de conclusion, nous pouvons affirmer que le sémantisme du moț " dor " se révèle au traducteur à travers un profond travail d'interprétation. Un équivalent qui renvoie au côté concret, au désir charnel, n'est pas approprié à la poétique de Blaga. De même, l'emprunt du terme dans la langue d'accueil, sous prétexte de fidélité, est
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